Cerveau, petites histoires et manipulations…

L’étude du fonctionnement de notre cerveau permet de mieux comprendre la manière dont nous pensons et formons nos avis. D’ailleurs, le livre d’Albert Moukheiber, « Votre cerveau vous joue des tours » vous permettra d’approfondir le sujet si vous souhaitez en apprendre plus.

En résumé, notre espèce a évolué dans un environnement hostile et a du développer des capacités pour y faire face tout au long des générations. Notamment via le fonctionnement de cet organe qu’est le cerveau. Mais la masse d’information à traiter est tellement importante qu’il n’y arrive qu’au prix de raccourcis, approximations et remplissage des informations manquantes.

Autrement dit, nous avons tous tendance à nous raconter des histoires (moi compris) pour se protéger ou comprendre le monde et bien souvent les faits sont réécrits pour être à notre avantage. Prendre du recul sur ces phénomène est dur (en temps d’apprentissage et en attention pour le faire) et donc couteux en énergie.

Ces petits arrangements avec la réalité ne sont pas un problème quand ils nous permettent d’avoir le temps de digérer une situation trop dure à gérer sur l’instant ou nous rassure, mais ils deviennent problématiques lorsqu’ils commencent à faire plus de mal que de bien.

Et cette capacité à faire des liens ou combler les manques est aussi un levier qui peut nous transformer en victimes de personnes plus ou moins bien intentionnée (et qui ont généralement un intérêt, souvent financier, à nous faire croire ce qui les arrange).

J’ai pour ma part étudié la méthodologie scientifique durant mes études d’économie (DEUG, Licence, Maîtrise et DEA) avec des cours d’épistémologie et de statistiques puis d’économétrie, pour produire des études scientifiques. J’ai complété cela avec des lectures ou des cours en ligne sur les neurosciences et autres biais et bien évidemment la méthodologie.

Présenté ainsi, vous supposez que j’ai obtenu mon diplôme de DEA et vous me créditez implicitement d’un BAC+5. Hors même si j’étais 3ème de ma promo et que mes enseignants me voyaient déjà faire une thèse, j’ai eu des soucis de santé suffisamment importants et longs pour que je ne puisse pas rendre mon mémoire et n’ai donc pas validé l’année ni pu me réinscrire l’année suivante. (Mais j’ai effectivement un BAC+5 puisque j’ai d’autres diplômes dans d’autres disciplines).

Et si dans mon cas cela ne change pas grand chose, je vais rajouter 3 exemples supplémentaires pour illustrer mon propos :

  • Une de mes anciennes camarades de classe, se présentait ainsi : j’ai fait 3 années de Licence. Cela laisse penser à une Licence (puisqu’en 3 ans), donc à un BAC+3. Il s’avère qu’elle avait tenté 3 fois la première année sans succès ;
  • Une naturopathe que j’ai rencontré, parlait de son cursus en ces termes : « J’ai fait l’école de médecine », elle laissait passer clairement 3 secondes avant d’ajouter « naturelle du docteur X » (je ne me souviens plus du nom du gars) ; présenté ainsi les gens n’entendent « qu’école de médecine » et pensent qu’elle a fait la fac de médecine (amalgame entre école et faculté) alors qu’elle a fait une école privée n’ayant pas de rapport avec la faculté de médecine bien entendu ;
  • Je demandais des informations à un praticien en médecine chinoise sur son cursus, il me répond qu’il a fait 5 ans d’études. En discutant, il s’avère que ce n’était donc pas un BAC+5 mais 12 week-ends par an sur 5 ans, soit en gros un semestre de cours à temps plein.

Où voulais-je en venir ? Il est aisé de faire croire à quelqu’un (surtout s’il a envie d’y croire) que l’on a des qualités, un niveau d’étude ou un titre que l’on n’a pas.

Que penser de la compétence de ces gens qui ont besoin de recourir à de tels subterfuges ? Soit ils sont sincères et arrivent à se tromper eux même (Effet Dunning-Kruger, appelé aussi illusion de connaissance) parce qu’avec des études assez courtes il manque généralement beaucoup de choses pour une réelle compétence ou la capacité à travailler en équipe pluridisciplinaire, soit ils savent très bien ce qu’ils font et là on est dans la manipulation.

Il en est d’ailleurs de même avec l’amalgame entre formation et droit d’exercer. Là encore c’est notre cerveau qui rempli les trous. Beaucoup de formations ne font que survoler un sujet et ne permettent pas d’accompagner des patients ; cela nécessite donc une législation pour assurer la protection des populations. Et pour cela nous avons le Code du Sport ou le Code de la Santé Publique : ils listent les formations assurant une sécurité suffisante pour le public.

Si la formation qui est annoncée (et le titre l’accompagnant) ne fait pas partie de la liste, elle n’est pas autorisée à exercer ; quel que soit le nom, surtout s’il est ronflant.

Ne vous laissez pas manipuler.

Ce contenu a été publié dans Articles, Méthode Scientifique. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

Laisser un commentaire